Pour avoir l'air intelligent, achetez des livres
Long Read
30-10-2016
On était tellement frustrés de ne devoir retenir que trois articles longs par semaines pour les Long Reads de Hook qu’on a décidé de vous proposer un nouveau format. Chaque semaine, on vous traduit et on vous synthétise un article anglais hyper cool qu’on a lu dans la semaine pour que vous puissiez comprendre les idées principales de l’article et en parler autour de vous, en 2 minutes.
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Il y a quelques mois, quand un vendeur a proposé à Frank Furedi (sociologue et ancien professeur de l’université de Kent) d’acquérir une collection de livres anciens pour “embellir sa bibliothèque”, ce dernier s’est rendu compte à quel point le livre est, encore aujourd’hui à l’ère du digital, le symbole du raffinement culturel par excellence.
Après s’être penché sur la question, il s’est rendu compte que ce statut hyper privilégié du livre remonte en fait à l’invention de l’écriture. Et que, depuis, ce statut ne s’est jamais perdu.
“En Mésopotamie, seul un petit groupe de scribes pouvait déchiffrer les écritures cunéiformes. Et ceux qui pouvaient interpréter ces signes jouissaient d’un prestige immense.”
Mais au fur et à mesure, le prestige est passé de l’acte de lecture en lui-même au simple fait de posséder des livres et de s’afficher entourés d’eux. Le philosophe Sénèque disait même que “de nombreuses personnes sans éducation ne considèrent pas les livres comme des outils d’étude mais comme des décorations pour leur salon. (...) La bibliothèque est devenue un élément d’ornementation essentiel pour un foyer riche.”
Plus tard, à la Renaissance, les collectionneurs de livres (comme l’essayiste Richard de Bury qui aurait possédé une collection de livres telle qu’il en devenait “presque impossible de se déplacer dans sa chambre sans marcher dessus”) se multiplièrent. Mais leur passion était aussi de plus en plus souvent tournée en dérision...
“L’image que renvoyait la lecture était même peut-être plus importante que l’acte de lecture en lui-même”
Se montrer entouré de livres devient une façon de prouver son érudition et son appartenance à une certaine élite culturelle. Au XVIIIème siècle, le vice est même poussé jusqu’à créer une véritable ségrégation entre les lecteurs. Où plutôt entre les “lecteurs” et les “gens qui lisent”. C’est à dire entre ceux qui lisent pour l’amour de la lecture et ceux qui lisent pour se montrer en train de lire. Autrement dit, entre l’élite et la plèbe, représentée par tous les “nouveaux lecteurs”.
“L’acte de lire en lui-même est devenu tellement prestigieux que faire la lecture à son enfant est, au pire, vu comme une marque de compétence parentale et au mieux, considéré comme un signe de véritable supériorité morale et culturelle."
Aujourd’hui, à l’ère du tout digital, les choses ont un peu changées. Mais Frank Furedi dresse un parallèle intéressant. Auparavant, la lecture ostentatoire d’un livre permettait au lecteur d’envoyer un message sur son statut et son érudition. Aujourd’hui, c’est la connectivité et la capacité à être constamment sollicités que nous montrons au monde lorsque, à peine assis à la terrasse d’un café, nous dégainons notre smartphone.
“Aujourd’hui, le consommateur de contenu digital est en concurrence avec le lecteur de livres papier dans la course à l’affirmation culturelle. Mais quelle est la forme de lecture qui mérite d’être la plus valorisée ?”
Pour Frank Furedi, la réponse est simple : “ceux qui veulent afficher leur intelligence considèrent que les textes digitaux ne servent pas de marqueurs culturels”. Ce qui, selon lui, expliquerait en partie la reprise des ventes de livres papier, ou encore le fait que la bibliothèque reste encore aujourd’hui un symbole de raffinement culturel.
"Contrairement aux livres, la tablette n'est pas un support qui renvoie une image de goût et de raffinement."
La vision de Frank Furedi semble quand même un peu extrême... Peut-on vraiment réduire l’érudition au support utilisé pour se cultiver ? Qu’en est-il des lecteurs de contenus digitaux de qualité ? Qu’en est-il du littéraire passionné remplissant sa liseuse numérique d’oeuvres classiques ? Le livre papier est-il vraiment le seul instrument ostentatoire de l’intelligence ?
Cliquez ici pour lire l'article entier de Frank Furedi sur Aeon (en anglais)
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Il y a quelques mois, quand un vendeur a proposé à Frank Furedi (sociologue et ancien professeur de l’université de Kent) d’acquérir une collection de livres anciens pour “embellir sa bibliothèque”, ce dernier s’est rendu compte à quel point le livre est, encore aujourd’hui à l’ère du digital, le symbole du raffinement culturel par excellence.
"Contrairement aux livres, la tablette n'est pas un support qui renvoie une image de goût et de raffinement."
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