Peut-on tuer la mort ?

Peut-on tuer la mort ?

Les technologies de l'immortalité

On vous l’avait dit à la fin de l’article sur le marshmallow : écrire un topo, c’est un énorme boulot. Et pour plancher sur le suivant, on avait vraiment besoin d’un coup de main. On a reçu plein de candidatures géniales. Et parmi elles, il y avait Aude. Aude, sa spécialité, c’est l’histoire (son site, www.histoiredujourbonjour.com, est vraiment top). Mais en plus de ça, Aude a un dada : l’immortalité. Elle est venue nous voir avec une pile de bouquins sous le bras, en nous promettant de la tendresse et du chocolat. Bref, on ne pouvait pas ne pas bosser avec elle, et elle nous a filé un sacré coup de main. Merci encore, Aude !

Temps de lecture : environ 25 minutes (oui, vous êtes prévenus : c’est un gros morceau)

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Greg a 14 ans. Et il adore son père.

Son père, c’est Etienne. Etienne lui a appris à jouer au foot. Un jour, il lui a construit sa cabane dans la forêt. Et il lui a même offert un vélo rouge trop bien pour ses 12 ans. Bon, de temps en temps, Etienne fout un peu la honte à Greg. Par exemple, quand il l’attend à la sortie de l’école. Ou quand il se met à danser bizarrement après quelques verres en soirée. C’est un peu gênant, mais à la limite, c’est rigolo.

Mais il y a un truc qui fait que le père de Greg est vraiment ringard. Et même carrément LE ringard ultime. Là, en fait, on est en 2037. Le père de Greg, il est né avant 2000. Et comme tous les gens de sa génération… eh bah, il va mourir.

Alors que Greg et ses potes, eux… ils sont de la "nouvelle ère". Ils font partie des tout premiers êtres humains à être immortels.
 


1 - UN SUJET DE FOU TRAITE PAR DES GENS PAS FOUS DU TOUT


Bon.

Là, vous vous sentez peut-être déjà un peu perdu.

C’est vrai que pour ce nouveau topo, on a choisi un sujet qui envoie du lourd : l’immortalité. On se doute un peu de ce que vous allez dire : “nan mais ils ont craqué chez Alfred, l’immortalité ? c’est quoi ce délire ??

Eh bah au début, on était comme vous. On regardait passer les articles d’un air un peu narquois, sans trop y croire. Mais ces articles, on en a vu passer de plus en plus. En traînant sur des sites sérieux, des sites scientifiques, on s’est aperçu que pas mal de gens avaient l’air de trouver le sujet pas si barré que ça. Et un jour, on est tombé sur cette phrase :
 
Si vous me demandez si on peut vivre jusqu’à 500 ans ? Je réponds oui”.

Oui, on sait, cette phrase paraît dingue. Du coup, petit quiz :
 
Qui est l’auteur de cette phrase ?
 
              
Eh non. Le mec qui a dit ça, ce n’est ni le Dr. Frankenstein, ni Raël. C’est... le mec en sweat-shirt. Mais ce mec, ce n'est pas n'importe qui : c'est Bill Maris. Et il est président de Google Ventures, un fonds d’investissement qui soutient les start-ups les plus innovantes dans le domaine des biotechnologies. Accessoirement, Bill est aussi un des fondateurs de Calico... une boîte dont on va pas mal parler dans ce topo.
 
 
  • Calico, ou quand Google veut "tuer la mort"

Calico. C’est un nom qui a l’air tout gentil, comme ça.
 

Mais ça n’est pas juste des poils de chats. Ça veut aussi dire Californian Life Corporation. Et c’est une boîte créée en 2013 par Google avec un objectif : lutter contre le vieillissement et accroître l’espérance de vie de l’espèce humaine. En gros : tuer la mort.
 

Dit comme ça, ça peut paraître un peu bête, ou en tout cas très naïf. Sauf que comme à chaque fois que Google lance un projet, ils ne rigolent pas du tout. Là, ils ont même déployé la grosse armada : partenariats avec Harvard et le MIT (les deux plus grands laboratoires universitaires du monde), recrutement de chercheurs stars dans leurs domaines... Le boss de Calico, par exemple, c’est Arthur Levinson, patron de Genentech, le leader mondial dans le secteur des biotechnologies. Mais Calico, c’est aussi un budget de 1,5 milliard de dollars...
 
Par comparaison, le CNRS, qui est accessoirement le plus grand organisme de recherche européen, c’est 3,4 milliards d’euros... mais répartis entre dix domaines de recherche. Alors que Calico, ils ne bossent que dans un seul domaine : 
 
Concrètement, ils font quoi ? Bah par exemple, pour leur dernier projet, ils se sont associés avec AncestryDNA, une boîte spécialisée dans le décodage de l’ADN humain. Ensemble, ils vont analyser plus d’un million d’échantillons d’ADN. Puis ils vont croiser les résultats avec les arbres généalogiques de leurs possesseurs. Leur but ? Identifier le gène qui détermine l’espérance de vie d’un individu. En gros, d’ici quelques années (ou d’ici quelques mois ?), ils pourront vous dire quand vous allez mourir. Ça, c’est une première étape. Parce que leur but, comme le dit Bill Maris, c'est finalement de vous empêcher de mourir. En vous faisant vivre jusqu’à 500 ans... voire plus.  
   
 
  • Ces boîtes qui nous promettent l'immortalité

Ça paraît délirant ? Et pourtant : tout ça, il n’y a pas que Google qui le dit.
 

En fait, il y a pas mal de personnes qui tiennent un discours assez proche. Et ce sont loins d’être les premiers venus : en France, il y a notamment Laurent Alexandre. Après un “rapide” parcours universitaire (chirurgien de formation, le mec a ensuite fait HEC, Sciences Po et l’ENA), il fonde Doctissimo en 1999. Et depuis plusieurs années, il est devenu LE spécialiste de l’immortalité en France. Et il s’est notamment fait pas mal en connaître en concluant sa conférence Ted par ces mots :
 


Venant de lui, ce n'est pas vraiment une promesse en l’air : sa société DNAVision est le leader européen du séquençage génétique - un des sujets majeurs pour arriver un jour à l’immortalité.

L’autre exemple, c’est Sergueï Brin, co-fondateur de Google. Avec son ex-femme, ils ont créé 23andme : une société qui propose de décoder votre génome pour 100 dollars. Du coup, Sergueï a décodé son propre ADN. Et il s’est aperçu qu’il avait de grandes chances de choper Parkinson d'ici 2040. Depuis, il est hyper motivé pour progresser sur ces questions...
 

Plus largement, l’immortalité est en train de s’imposer comme un sujet central dans le monde de la recherche. Une des raisons principales, ce sont les investissements massifs de plein d’entreprises de biotechs dans le domaine. Auparavant, la recherche en biotechs était surtout sponsorisée par les Etats. Désormais, elle est financée à 66 % par l’industrie privée. Et pour attirer les meilleurs, encore une fois, ils mettent les moyens : Sergueï Brin et Mark Zuckerberg ont créé les Breakthrough Prizes : un prix de 3 millions de dollars attribué deux fois par an à un chercheur ayant contribué à augmenter l’espérance de vie. Pour info, un Prix Nobel, c’est un million de dollars. Forcément, ça suscite des vocations...

 
  • Morts pour l'immortalité : quelques tentatives plutôt ratées

Tout ce discours, il y a quelques années, vous auriez eu plutôt raison de le trouver complètement délirant. Dans le domaine de l’immortalité, l’humanité a déjà fait quelques tentatives. Et il faut bien dire qu’à chaque fois, c’était plutôt raté :

- la technique espagnole : en 1513, l’explorateur Ponce de Léon, arrivé au nouveau monde avec Christophe Colomb, se met en quête de la fontaine de jouvence, qu’il espère trouver en Floride. Il trouve des alligators, mais pas de fontaine. Les alligators le trouvent aussi, et le bouffent. Lui... et tout son équipage.
Bilan : 160 morts
Années de vie gagnées : 0

- la technique hongroise : autour de 1610, la comtesse hongroise Elisabeth Bathory aurait torturé et tué 650 personnes dans son château de Trencin. Apparemment, elle espérait rajeunir en buvant leur sang. Ça n’a pas vraiment marché : elle est morte dans son cachot, emprisonnée par sa propre famille.
Bilan : 650 morts
Années de vie gagnées : 0

Fun fact appris au passage : Dracula était une femme.
 

-la technique américaine : depuis le début des années 60, environ 200 américains ont fait congeler leur corps en espérant pouvoir être “réveillés” un peu plus tard. Pas de bol : en fait, avant 2004, la technique de congélation utilisée (on dit aussi cryogénisation) n’était pas au top. Résultat, on s’est aperçu a posteriori qu’il se formait pendant l’opération des cristaux de glace qui abîmaient de manière irrémédiable les tissus. Pour tout ceux qui ont tenté le coup avant 2004, eh bah… c’est raté.
Bilan : 0 ressuscité


Bref, sans parler de l'immortalité de l'âme (qui relève de la religion et dont on ne parlera pas ici), l’immortalité du corps, ça a longtemps été un sujet qui était quelque part entre la science-fiction et le délire. Là où les choses ont changé, c’est que, ces dernières années, la science a fait des progrès sans précédent dans énormément de domaines. Et que ces progrès ont pu être appliqués dans d’autres domaines connexes. Cette transposabilité du progrès, c’est un truc qui a complètement boosté le rythme des innovations technologiques.

 
  • Un contexte technologique hyper propice

- La loi de Moore

Pour comprendre ça, revenons à Etienne et Greg. En l’espace de quelques années, en fait, il s’est passé un truc de fou entre leurs deux générations. Quand il avait quinze ans et qu’il allait chez le médecin, Etienne, le père de Greg, il posait ça, comme question :
 
 

Alors qu’en 2037, quand Greg va chez le médecin, il n’a même pas le temps de parler. Le mec lui dit direct :
 


La différence ? En quelques années, on s’apprête à passer d’une logique curative (qui intervient une fois que la maladie est détectée) à une logique préventive (qui détectera la maladie avant qu’elle se déclare).

Comment c’est possible ? Depuis les années 50, le progrès humain a connu une croissance sans précédent. Une croissance si forte qu’elle était pratiquement imprévisible. Pratiquement imprévisible, oui… Sauf pour un mec - Gordon Moore. Moore, c’est un des ingénieurs qui a fondé Intel. Et un beau jour de 1971, il a balancé ça :
 


Bon, sa prédiction, Gordon Moore l'a sans doute faite un peu au pif : quand il a dit ça, il n’y avait aucune raison qu’elle se réalise. Et pourtant : depuis 44 ans, la loi de Moore n’a jamais été démentie.
 

En tout cas, cette “loi” est le meilleur exemple du rythme incroyable du progrès de la puissance de calcul de nos processeurs. Et ça, ça a permis des avancées dans plein de domaines.


- La convergence des technologies

On est à nouveau en 2015. Etienne a 25 ans. Il est en stage, et il se tape une grosse, grosse charrette. Il est 23 heures et il est encore coincé à son bureau (ouais, galère). Il commence à avoir un petit creux. Voilà ce qu’il se passe :
 

22 ans après, son fils Greg est dans la même situation. Mais pour lui, ça ne se passe pas exactement pareil :
 
 

En fait, Greg a à peine eu le temps de se rendre compte qu’il avait faim. Il vit dans un monde où les technologies sont si étroitement interconnectées qu’elles dialoguent entre elles sans même qu’il s’en aperçoive.  

Bon, cet exemple est un peu tiré par les cheveux. Mais ce qu’il faut dire, c’est que les progrès parallèles dans plein de domaines différents s’alimentent les uns les autres et finissent par se rejoindre en une seule expérience unique (dans notre exemple, la livraison instantanée). Et c’est ce qu’on appelle la convergence des technologies.
 
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(début de la parenthèse) 

Bon, franchement l'article est super long et c'est cool si vous êtes toujours là ! Ici, on avait envie de vous présenter les quatre sciences qui ont convergé, les NBIC. Mais si vous êtes pressés, vous pouvez passer :)
 
 
NBIC : les nouvelles techno à bloc
 
Il y a surtout quatre disciplines qui ont fait énormément de progrès parallèlement : on les appelle les NBIC - Nanosciences, Biotechnologies, sciences de l'Information, et sciences Cognitives. On vous les présente rapidement : 


- Les nanotechnologies

Elles permettent d’agir à une échelle d’un milliardième de mètre. C’est à dire que c’est vraiment très, très petit.
 

Et grâce à ça, on peut avoir des traitements hyper ciblés capables d’agir directement à l’échelle des cellulesSuper cool


- Les biotechnologies

Ça, ce sont toutes les technologies qui permettent d’améliorer les capacités du corps ou du cerveau. Et ça évolue très, très vite. Récemment, on a réussi à conférer à des rats la vision infrarouge en connectant un capteur à leur cerveau. Et la semaine dernière, deux personnes paralysées ont même réussi à contrôler le curseur d'un ordinateur par la pensée, grâce à des neuroélectrodes. Assez waouh. 


- L’informatique

C’est ce qu’on disait un peu plus tôt : grâce à la loi de Moore, la puissance de calcul des puces électroniques a été multipliée par quasiment un million. (Oui, oui, un million, Larmina). 


- Les sciences cognitives

Pas de doute : si Gary Kasparov, le champion d'échecs, devait affronter un ordinateur actuel... il se ferait bouffer en deux secondes. La connaissance du cerveau humain et de l’intelligence artificielle ont tellement progressé que pas mal de gens craignent carrément que les robots prennent bientôt le pouvoir (et ça, on risque d'en reparler très bientôt dans un prochain topo...).


(fin de la parenthèse) 

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Bref, en combinant les avancées des NBIC, on a pu faire pas mal d’innovations assez incroyables. Mais une des plus importantes, c’est la diminution du coût du séquençage du génome humain.

 
  • Grosse promo sur le séquençage du génome !

Le génome, c’est le “code” de chaque être humain : c’est le programme qui définit un individu. Son système d'exploitation, en gros. Pendant très longtemps, on pensait qu'on n'arriverait jamais à séquencer le génome. Eh bah on se trompait. Le premier séquençage a pris 7 ans et il a coûté 3 milliards de dollars. C’était en 2001. Maintenant, ça se fait en 4 heures... et pour seulement 100 dollars.
 
Oui, le prix a été divisé par 30 millions en 13 ans. Sympa comme promo, non ?

Le séquençage, ça permet deux choses :
-diagnostiquer une maladie génétique avant qu’elle ne se déclare en repérant le gène déficient
-améliorer les traitements en ciblant directement le gène en question.

En gros, grâce aux progrès des NBIC, la médecine va disposer d’outils 10 000 fois plus puissants que tout ce qu’elle a inventé jusqu’à présent. Et elle va vraiment pourvoir passer à la vitesse supérieure. Et donc se rapprocher de l’immortalité ?
 


2 - L'IMMORTALITE, UN SIMPLE PROBLEME MECANIQUE ?


N’importe quel bon bricolo vous le dira : “Pas possible de faire du bon boulot sans les bons outils”. Bah la médecine, c’est pareil. Au début, les techniques étaient un peu rudimentaires...

-la foreuse à soin dentaire de Mergath (7000 avant JC) :
 
-la scie chirurgicale (100 avant JC) :

-les scalpels, écarteurs et pinces d’Abu al-Qasim al-Zahrawi (1000 après JC) :
 
Depuis... l’évolution de la technique a permis d’énormes progrès. Et, conséquence directe : les humains ont pu vivre de plus en plus longtemps.

 
  • L'allongement de l'espérance de vie


Ça, c’est l’évolution de l’espérance de vie humaine depuis 1750 :  
 


Cet allongement, il est dû à plein de choses : progrès de la médecine, de la nutrition, de l’hygiène, absence de guerre, diminution de la mortalité infantile... C'est à dire l'amélioration des conditions de vie.

Mais si l'espérance de vie s'améliore, en revanche, il y a un truc qui n'a pas augmenté : c'est la longévité, ou l'espérance de vie maximum.  
 

Car les humains n'ont pas attendu le XXème siècle pour vivre vieux. Vers l'an 150, Lucien de Samosate avait fait une liste des centenaires célèbres de l'antiquité... et il y en avait déjà pas mal ! Même si leur âge était exagéré et qu'ils ont sans doute plutôt vécu 80 ans que cent. Mais il y a au moins deux exemples avérés : Louis XIV (né en 1638) et l’empereur romain Auguste (né quand même en 63 avant J.C.) : ils sont tous les deux morts à 77 ans.

La question derrière ça, c’est : peut-on repousser indéfiniment l’âge de la mort ?

 
  • Peut-on vivre plus de 120 ans ?

On a une super nouvelle à vous annoncer : la petite Jeanne est née !
 


La petite Jeanne, là, c’est Jeanne Calment. Vous la connaissez forcément : elle a été doyenne de l’humanité de 1989 jusqu’à sa mort en 1997 - à l'âge de 122 ans. Et pour l’instant, personne n’a fait mieux. Elle reste la personne qui a vécu le plus longtemps de toute l’histoire de l’humanité.
 
Et pour pas mal de médecins, ce cap des 120 ans serait un peu indépassable. A partir d’un certain âge, les cellules dégénèrent. Les fonctions vitales se mettent à ne plus fonctionner correctement… et on meurt.

Parce qu'en fait, il y a trois choses qui provoquent la mort :
 
Les premiers, la médecine ne peut rien y faire. Mais les deux autres, si. Et elle sait même déjà comment.

 
  • Les innovations qui vont permettre l’immortalité

La Silicon Valley, c’est la capitale mondiale des entrepreneurs. Et là-bas, on a une conviction : à chaque problème, sa solution. C’est une recette qui a pas mal fonctionné depuis quelques années :
 

Pour atteindre l'immortalité, les entreprises de biotech ont deux pistes : supprimer les maladies, et interrompre le processus de vieillissement.


- Les maladies ? Demain, j'arrête

Supprimer les maladies ? Rien de plus facile grâce à quelques uns de ces gadgets plutôt high-tech :
 
  • Les biocapteurs

Robocop et Terminator en avaient plein : situés sous la peau, ce sont des petites puces qui mesurent en permanence vos paramètres sanguins... et les transmettent direct à votre médecin. Sauf que ce n'est plus de la SF : même les joueurs du FC Nantes (oui oui, le club de foot) en ont. Depuis septembre, ils utilisent des biocapteurs qui mesurent leur température intestinale toutes les 30 secondes. Plus tard, les biocapteurs pourront même nous administrer des médicaments, tout seuls comme des grands.
Qui bosse là-dessus ? Google, entre autres
Ils veulent sortir ça quand ? C’est sorti !

 
  • Le nano-robots et le bracelet anti-cancer de Google

Eux, ils sont un peu en mode Il Etait Une Fois La Vie... sauf qu'ils sont artificiels. Les nano-robots, ce sont des organismes capables d’agir à l’échelle du nano-mètre. Grâce à eux, les prochaines versions des montres connectées auront une fonctionnalité assez stylée : l’option guérir le cancer. Bon OK, ce ne sera pas forcément des montres : mais Google vient de déposer le brevet d'un bracelet anti-cancer. Un dispositif qu'on porte autour du poignet et capable de détruire uniquement les cellules cancéreuses... contrairement à la chimio, qui détruit tout. Bref, un progrès plutôt intéressant.
Qui bosse là-dessus ? Google
Ils veulent sortir ça quand ? D’ici 5 à 10 ans.

 
  • L’ingénierie génétique

Là, notre corps devient carrément une sorte de téléphone sur lequel on installe des applis ou des mises à jour. Le principe, c'est exactement le même : une fois le génome séquencé, on diagnostique à l’avance les maladies dégénératives (pour l’instant, ce sont à la fois les plus dures à détecter et les plus difficiles à guérir). La prochaine étape de la médecine, ça consistera donc à traiter directement les gènes déficients en les modifiant. C'est l’ingénierie génétique.
Qui bosse là-dessus ? Ben ça, personne ne s’en vante, parce que c’est un peu touchy.
Ils veulent sortir ça quand ? D’ici environ 20 ans

 
  • Les cellules souches

Ça, c’est un sujet un peu flippant. Pour l’instant, quand un patient bien portant a besoin d'un nouvel organe, il a une seule possibilité : le don d'organe. C’est un peu comme aller à la casse : on récupére des pièces détachées... Mais bientôt, on pourra commander des pièces neuves directement à l’usine. En fait, les cellules souches vont permettre de créer des fermes à organes, dans lesquels on pourra produire à la demande des organes. Miam.
Qui bosse là-dessus ? Pas mal de monde, mais surtout les Chinois
Ils veulent sortir ça quand ? au doigt mouillé, on dirait 10 ans, à peu près...



Donc entre les technologies qui sont déjà sorties et celles qui vont arriver d’ici vingt ans, la fin des maladies, ça pourrait être pour bientôt. Ce que ça changerait ? Bah on serait de plus en plus nombreux à arriver tranquillos au seuil de nos 120 ans de vie… où on pourra “mourir de vieillesse”.

Mais du coup : on mourra quand même.

Si on vise l’immortalité, on ne peut donc pas se contenter de supprimer les maladies. Il faut carrément s’attaquer au vieillissement. Et ça, apparemment… bah ce sera aussi bientôt possible.


- Vieillir ? Non merci !

C’est quoi, vieillir ?
 

Oui, bon c'est sûr, c’est un peu tout ça. Mais scientifiquement, c’est surtout le fait que les cellules dégénèrent. Au cours de la vie, les cellules meurent et se reproduisent - ça, jusqu'à 52 fois. A chaque division, les chromosomes se raccourcissent. Puis, au bout d'un moment, ils deviennent trop courts pour se diviser. Et là, la cellule meurt. (Oui, c’est triste). Et quand trop de cellules meurent, le corps humain commence à sérieusement dérailler.

Pendant longtemps, on a cru qu’on ne pouvait rien y faire. Mais ce n’est plus le cas grâce à une enzyme magique : la télomérase.

 
  • La télomérase

Un chromosome jeune, il est un peu comme le héros dans les westerns américains : grand, fort, et un peu bourrin. Les chromosomes vieux, par contre... ils se sont divisés et reproduits plein de fois. Du coup, ils font nettement moins les fiers.
 

La télomérase, c'est une enzyme qui empêche les chromosomes de se raccourcir à chaque division en les aidant à se reconstituer. Le principe est hyper simple. Au lieu de vieillir à chaque division… eh bah les chromosomes rajeunissent. Le procédé a déjà été testé sur de vieilles souris : elles ont non seulement repris du poil de la bête (vraiment : leur poil redevenait noir et brillant), mais elles ont même récupéré des facultés neuronales.

Si ça marche chez l'humain ? C'est cette étude qui vient de répondre : OUI. La télomérase permet d’inverser le processus de vieillissement même chez l’humain.

Et ça, c'est vraiment l'innovation la plus incroyable, celle qui nous rapproche le plus de l'immortalité. C’est un peu comme si, avant, le corps avait une bombe à retardement à l’intérieur, vous savez, le truc stressant avec le minuteur et les chiffres rouges. Et là, avec la télomérase, un démineur est arrivé … et il a désamorcé la bombe.
 
 
  • Le post-humanisme

La toute dernière option, elle est vraiment chelou, mais apparemment, il y en a qui y croient. L’idée, ça serait de downloader notre conscience vers des cyborgs ou des disques durs. Un peu comme si vous vous sauvegardiez vous-mêmes sur un disque dur externe... depuis lequel vous contrôleriez un ordinateur. Bon, nous, on trouve pas ça très tentant. Mais il y a un milliardaire russe de 35 ans, Dmitry Itskov, qui consacre sa vie à ça. Il a même baptisé son projet “Avatar”, et il pense que c’est jouable pour 2045. Bon, bah on verra, hein...

 
  • Bon, alors ? L’immortalité, c’est pour bientôt ? (c’est que j’ai pas tout mon temps, moi)

En gros, il y a deux pistes principales.

La piste “supprimons les maladies”.
La piste “supprimons le vieillissement”.

La piste “supprimons les maladies”, elle paraît bien engagée. Avec elle, on vivrait tous pépouzes jusqu’à nos 120 ans (environ). Ça, c'est en cours et y'a pas mal de chances qu'on vive beaucoup plus vieux que nos parents. 

La deuxième piste, “supprimons le vieillissement”, elle est théoriquement possible mais elle n'a pas encore été appliquée. Alors, le premier immortel, c'est pour quand ?

Pour certains, c'est pour 2025. Pour d'autres, 2050. Ceux qui nous disent que ça va arriver rapidement, ce sont… les entreprises de biotechnologies. Elles, elles ont tout intérêt à dire ça, ne serait-ce que pour attirer l'attention et les financements. Faut dire que l'immortalité, ça fait quand même un sacré bon argument commercial... 
 

De l’autre côté, les médecins insistent sur le fait que l’approche solution/problème des entreprises de biotechs peut avoir une grosse limite : ne pas prendre en compte l'effet système. Le corps humain est une machine super complexe, les modifications génétiques peuvent avoir des conséquences complètement inattendues. Par exemple, Calico vient d'embaucher une chercheuse qui a réussi à quintupler la durée de vie d'un ver en désactivant le gène d'assimilation des lipides. Sauf qu’en faisant ça, le ver en devenu un peu neurasthénique : assimiler moins de lipides, c’est assimiler moins d’énergie, et donc être dans une sorte de "sous-vie".

Et tout cas, tout ça est en route. Et bien parti pour dessiner un monde complètement différent.



3 - UN MONDE SANS MORT
 
  • Une RE-VO-LU-TION

Nan, mais on vous jure : ça va être fou. Encore plus fort que la sortie d'un nouvel iPhone. Une révolution, mais au sens strict du mot, c'est à dire “un changement brusque et violent dans la structure d’un état”. Oui parce qu'un monde sans mort, c'est un monde qui ne ressemble en rien à celui qu'on connaît. Et l'immortalité, c'est une révolution beaucoup plus radicale que toutes celles que l'humanité a connues.

Des révolutions, il y en a eu plein. Rien que dans le domaine technique, on en compte au moins trois :
 
Alors, bien sûr, chacune de ces révolutions a vraiment changé le mode de vie de ceux qui les ont vécues. Mais elles n'ont pas changé le monde : chacune de ces révolutions a suivi les axes existants du progrès. Elles n’ont fait qu’accélérer le rythme de tendances déjà présentes.
 
Leur apport principal, ça a été de réduire de le temps et l’espace. Or, ce qui se passe avec l’immortalité, c'est beaucoup plus que ça : c’est un changement radical de société. Parce que s’il y a un truc central dans l’existence humaine, c’est quand même bien l’éventualité de la mort. Et il se passerait quoi, sans la mort ?

 
  • Des pistes de scénarios

Là, on a brainstormé avec toute l’équipe pour voir ce que nous on ferait si on devenait immortels. Le résultat n’est pas toujours brillant, mais ça donne ça :
 
  • L’option Wall-E : un monde de glande

Immortel, les mecs ! Eh ouais ! Ça veut dire qu’on a tout le temps ! En plus, comme on est tous immortels, les meilleurs savants ont pu bosser toute leur vie au top de leurs possibilités intellectuelles et on a vite inventé des robots trop stylés qui font tout le boulot à notre place. Du coup : on profite. Et il n’y a pas grand chose de plus à raconter.
 
  • L’option Usain Bolt : tous trop forts

"Le piano ? Oh, il faut pas moins d'une vie pour savoir vraiment en jouer." Ah ouais, une vie ? ça tombe bien, j'en ai plein. Là, on a tous l’équivalent de plein de vies à consacrer à tout ce qui nous fait envie. Je veux apprendre la clarinette ? Pas de problème, je vais bosser ça une petite dizaine d’années. Ah non, en fait je préfère le Ju-Jitsu : okay, je me donne 12 ans pour devenir ceinture noire. Et après, j’apprendrai peut-être le grec antique. Histoire de rigoler.
 
  • L’option orphelins à l’envers : le luxe, c’est les enfants

On est tous immortels et plus personne ne meurt. C’est cool, mais ça pose un léger problème en termes de place sur la planète et de consommation des ressources. Du coup, tous les gens qui ont choisi de devenir immortels ont été stérilisés pour limiter la prolifération de l’espèce humaine. Le choix ? Vivre pour toujours, ou avoir des enfants. Cornélien. Enfin, surtout très baddant...
 
  • L’option Norbert le robot : le travail, c’est pas pour les humains

Au début, les robots nous ont remplacé dans les usines. Puis très vite, ils sont devenus plus forts que nous pour pas mal de trucs : ils ont remplacé les journalistes, les comptables, les business developpers. Des algorithmes hyper puissants négocient les deals commerciaux pendant des séances publiques que les humains observent en spectateurs, comme devant une partie d’échecs de haut vol entre génies. En tout cas, la valeur ajoutée du travail humain, maintenant, elle est de zéro. Du coup, on a tous des potagers pour se payer ce luxe inouï : avoir un outil dans la main. Et mal au dos le soir en rentrant chez soi.
 
  • L’option Hal 9000/Terminator : Man vs Robot

Ben ça, ça nous pendait au nez. A force de vouloir rendre les robots plus intelligents que nous, pour qu’on puisse glander toute notre éternité, on a réussi. Ils sont devenus malins. Très malins. Et ils se sont aperçus d’un truc : leur concurrent, sur la planète, l’espèce qui les empêche eux de proliférer, ce sont… les humains. A partir de là, notre éternité devient d’un seul coup très courte : les robots nous ont effacé de la surface de la planète aussi simplement qu’on redémarre après un bug.  


Bon, cet article sur l'éternité arrive finalement à sa fin. L’immortalité, ce n’est peut-être pas pour demain. Mais ce qui paraît très plausible, c’est qu’on s’en approche beaucoup plus rapidement que ce qu’on pourrait croire.

Nous, franchement, on trouve ça un peu flippant. Et on a envie de vous dire :


Profitez de la vie tant qu’elle est encore courte.
 
 
 
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On cherche des plumes !
 
On a déjà reçu plein de candidatures géniales, mais on en veut bien d'autres ! Comme la dernière fois, on cherche des gens qui soient journaliste, chercheur, ou juste très curieux, doté d'un super sens de la synthèse et capable de parler de sujets complexes tout en étant hyper marrant. Des perles rares, quoi. Si ça vous ressemble ou que ça vous fait penser à un pote à vous, surtout, écrivez-nous !
 

Concours terminé

Topo, n.m., {escalade} : guide utilisé par les alpinistes et décrivant la voie pour atteindre le sommet.